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Catégories, Sur l'interprétation de Aristote (Organon)

Avant de commencer un petit commentaire sur cette pièce majeure de la philosophie grecque, il faut commencer par un préliminaire sur l'auteur et l'histoire de son oeuvre.

Aristote (-384 à -322) est un macédonien, précepteur d'Alexandre le Grand. Il fut élève de Platon (-428 à -347) et il développe ensuite une philosophie que l'on appelle "réaliste" en ce sens où elle se base sur l'observation du réel et non sur des idées abstraites.

Si nous connaissons les œuvres d'Aristote c'est avant tout grâce à Boèce (480-524) puis ensuite à Avicenne et Averroès (11ème et 12ème siècle) puisqu'ils ont traduit en langues vernaculaires les écrits du philosophe.

Les publications d'Aristote vont, au fur et à mesure de leur découverte, présenter de nouveaux défis pour les philosophes et les scientifiques de l'histoire.

Cette oeuvre est avant tout une sorte de dictionnaire de "logique" de l'être, d'où le titre de "catégories": "categorein", qui signifie « accuser ». Car Aristote va accuser l'être, dénoncer ce qui est. Il s'agit donc d'une oeuvre métaphysique et technique où l'on va définir un grand nombre de concepts.

Aristote commence par une série de définitions passionnantes : l'homonymie, la synonymie, la paronymie.

"Sont dits homonymes les objets dont le nom seul est commun, alors que l'énonciation correspondant à ce nom est différente"

"Sont dits paronymes tous les objets qui tiennent leur appellation d'un certain objet, alors qu'ils en diffèrent par la dérivation. Par exemple, le lettré d'après les lettres, et le courageux d'après le courage"

"Sont dits synonymes les objets dont le nom est commun, et pour lesquels l'énonciation correspondant à ce nom est la même"(Cat.Chap1)

Dans les chapitres suivants, Aristote nous parle des énoncés qui sont dits "selon une combinaison " et ceux qui sont dits "sans combinaison"

"Chacun des termes qui sont dits sans aucune combinaison indique soit une substance, une certaine quantité, qualité, soit un rapport à quelque chose, quelque part, à un certain moment(...) par exemple : "homme, cheval", une quantité : "de deux coudées, de trois coudées", une qualité : "lettré, blanc" etc.

"Ces termes n'impliquent aucune affirmation (...) mais l'affirmation naît de la combinaison de ces termes les uns avec les autres. En effet on estime que toute affirmation est soit vraie soit fausse, alors que parmi les choses qui se disent sans aucune combinaison, aucune n'est vraie, ni fausse" (Cat.Chap4)

On a ici un exemple de la démonstration logique d'Aristote. Il nous montre que toute vérité s'obtient avant tout dans un langage qu'il faut bien formaliser. C'est la logique.

Par exemple il définit dans ce livre, des concepts tels que celui de "quantité", de "qualité" et il les catégorise. En effet il existe plusieurs formes de quantité selon Aristote : il y a celle qui est continue (quantité relative à une surface, un corps, une ligne etc) et celle qui est discrète (quantité relative à un nombre, un discours).

Aristote va même jusqu'à définir le terme de "relatif":

"Se disent relativement à quelque chose les termes de cette sorte : tous ceux dont on dit qu'ils sont cela même qu'ils sont "...d'autres chose", ou qui se rapportent de quelque autre façon à autre chose"(Cat.Chap7)

Ainsi "plus grand" est dit être cela même qu'il est par rapport à autre chose, car on dit qu'il est plus grand que quelque chose.

De plus Aristote manie les concepts habilement afin de les tourner puis de les retourner :

"Le double s'oppose à la moitié à la façon des relatifs, le mal s'oppose au bien à la façon des contraires, la cécité et la vue s'opposent selon la privation et la possession, et "il est assis","Il n'est pas assis" s'opposent à la façon de l'affirmation et de la négation"(Cat.Chap10)

Pourquoi Aristote nous entraîne-t-il dans une masturbation intellectuelle aussi rigoureuse pour si peu ?

En définitive, il veut nous montrer que la réalité est complexe et que d'après ce que nous percevons, nous pouvons affirmer des choses fausses par manquement à la rigueur du langage, de la définition, et des catégories.

Le Stagirite nous définit encore parfaitement ce qu'est "le changement" en le catégorisant :

"Il y a six espèces de changement : la génération, la corruption, l’accroissement, la diminution, l’altération et le changement selon le lieu"

Puis il le développe en énonçant les contraires, etc.

Le deuxième livre : "sur l’interprétation" commence par définir les différentes étapes qui vont nous amener à une vérité. Ainsi le "nom", "la signification temporelle", vont former "la proposition déclarative". La première "proposition déclarative" qui forme une unité est "l'affirmation", vient ensuite "la négation". Toutes les autres propositions, forment une unité par conjonction.

Aristote traite ensuite des affirmations. Comment en donner une négation et/ou une affirmation contraire ? etc.

Pour conclure on suppose qu'il s'agit d'œuvres qu'Aristote destinées au grand public et pourtant "les Catégories" et "Sur l’interprétation" sont extrêmement difficiles à lire et à comprendre alors qu'elles ont eu une influence considérable dans la philosophie occidentale. D'ailleurs Emmanuel Kant, dans sa "Critique de la raison pure"va remettre l'oeuvre an cause (avec beaucoup de respect) en signalant qu'Aristote mêle des expériences sensibles pures avec des concepts correspondants au mode empirique et donc il y a des erreurs conceptuelles difficilement repérables pour un néophyte.


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